jeudi 12 décembre 2019

Propagande en démocratie


Cet article se concentre sur la lecture des deux textes écris par : Chomsky et Herman. Le premier texte vient de l’essai: La Fabrication du consentement. Et, le deuxième intitulé : The Propaganda Model : a retrospective
Par: Adam Mira
Dans La Fabrication du consentement les médias sont décrits en tant qu’un instrument au service des particuliers, c’est-à-dire des personnes qui dirigent l’État et des hommes d’affaires possédant un poids financier important dans la société. En sus, ces particuliers mènent, voire dirigent les gouvernés par des processus tels que la propagande. Bien que les médias soient sous contrôle de strate supérieure pour certains, les néoconservateurs croient qu’ils sont un instrument sous contrôle de la gauche qui mène une croisade contre le système.
                                                     Chomsky
En revanche, le texte The Propaganda Model : a retrospective est basé sur l’analyse de critiques menées par des intellectuelles occidentales à l’ouvrage de La Fabrication du consentement, le but de cet article est de justifier et de mettre la lumière sur certains termes parus dans l’essai mentionner ci-dessus. 
En sus, les médias selon certaines visions restent anti-démocratie, et prennent une attitude et un comportement adverse à l’égard du gouvernement et des entreprises. Par ailleurs, l’article essaie de répondre à la question suivante : Quel est le modèle de propagande et comment fonctionne-t-il ? 
Dans La Fabrication du consentement les auteurs donnent une définition des médias et leur accordent cinq niveaux de filtrage de l’information afin d’être compatible à la diffusion et fait partie de la propagande. Les cinq niveaux seront expliqués dans les pages suivantes : le financement, l’identité du propriétaire et sa fortune dans le marché, les sources des annonces (gouvernementales vs privées) et l’anticommunisme.
En effet, le rapport explique la structure du modèle proposé dans La Fabrication du consentement, en se basant sur les deux textes ainsi que d’autres références
                                                                  Herman

I)              Taille, actionnariat, fortune du propriétaire et orientation lucrative 

Pendant longtemps, la taille de la presse écrite était modeste. Lorsque les journaux au milieu du XIXe siècle commencent à avoir une influence majeure sur certaines couches de la société, telle que la classe ouvrière, les riches déclenchent l’alarme, selon eux, il faut mettre fin aux journaux qui menacent leurs intérêts. C’est ainsi que les journaux ont subi des procès et que des décrets ont été promulgués afin de mettre des bâtons dans les roues de leurs croissances. 
À cette époque, en Angleterre et Aux États-Unis, la création de journaux de masse devient très chère, et les différents lobbyings cherchent à acquérir des titres. L’émergence de la radio et de la télévision ne changent pas beaucoup la règle, la strate supérieure cherche à partager l’achat de titres et de compagnies en vue de contrôler l’information. Le gouvernement est totalement complice, surtout les dirigeants des groupes étaient des fonctionnaires d’État et sa force de posséder une bonne partie du marché de la publicité, en plus, les groupes qui possèdent les différents médias sont aussi actionnaires dans d’autres business comme General Electric. Les médias occupent une partie du marché et l’information doit être contrôlée afin de servir les intérêts des propriétaires et leurs complices : le gouvernement et les publicitaires. 
Par ailleurs, le rôle du journaliste est de diffuser les informations reçues, cependant, les propriétaires ont des experts qui filtrent les informations avant même d’arriver aux journalistes, d’ailleurs les grandes agences de presse telles que : Associated Press (AP) et Agence France-Presse (AFP) et bien d’autres sont des agences privées ou semi-privées qui partagent le contrôle avec l’État. Ainsi, quoi que le journaliste soit intègre, les informations reçues ont déjà été filtrées par les experts. 
Pour la strate supérieure, l’information est une marchandise monnayable sur le marché, elle doit être rentable aux propriétaires et actionnaires. La concurrence est donc rude entre les différents médias afin de gagner plus.
Herman soutient cette idée, pour lui, les médias s’appuient fortement : sur le gouvernement et les grandes entreprises en tant que sources d’information, sur des considérations économiques et politiques et, souvent, sur des intérêts qui se chevauchent. La solidarité est forte entre le gouvernement et ses alliés les médias, leur but est de passer leurs intérêts avec le consentement de la masse.

II)            Poids de la publicité

Aux premiers temps, la survie des journaux était basée sur leur vente, leur extension rapide dans la société. C’est ce qui a attiré la strate supérieure qui a opté pour les annonces dans les journaux dont ils sont rapidement devenus les sponsors. Cependant, les journaux qui ne trouvent pas assez de publicités finissent par mettre la clé sous le paillasson. C’est le cas des journaux qui défendent la classe ouvrière. En effet, ils se retrouvent sans publicité, bien qu’ils aient des millions de lecteurs, et ferment, car les personnes qui lisent ce genre de journaux ne possèdent pas assez d’argent pour acheter leur journal préféré tous les jours. C’est une sorte de discrimination par la strate supérieure, Au fil du temps, tous les médias deviennent les esclaves des sponsors, alors les publicitaires, qui ont les moyens, sont ceux qui donnent vie aux médias. Pour cette raison, ces derniers essaient de trouver des annonces afin de continuer à rester sur le marché et de faire des profits, car à l’instar de ce qui est écrit ci-dessus, le but des médias est d’être rentable. 
Par ailleurs, les médias qui diffusent des reportages, des documentaires et qui publient des articles qui ne sont pas au goût des sponsors, ils seront châtiés et discriminés, en conséquence, ils ferment ou ils reçoivent un ultimatum afin de ne plus répéter cette erreur. 
Pour Herman, le secteur du journalisme professionnel intègre certaines des valeurs commerciales que les propriétaires des médias s’approprient, comme s'appuyer sur des sources officielles peu coûteuses en tant que source d'information crédible. Cependant, les journalistes essaient d’informer les citoyens sur certains évènements, même si leur impact reste infime et ne touche pas les intérêts des annonceurs.  

III)          Poids de sources gouvernementales et des expertes des pouvoirs  

Le gouvernement est la première source d’informations, telles que l’armée et la bureaucratie de l’administration. Ces composants de l’État sont des sources crédibles pour les médias, bien qu’elles possèdent elles-mêmes des magazines, des journaux, etc. 
De plus, la relation entre les médias et ses sources est basée sur des intérêts réciproques et commerciaux. Le gouvernement emploie les journaux qui seront en quelque sorte ses porte-paroles. Les médias aussi comptent sur le gouvernement pour avoir des informations variées, comme celles internationales, car cela reviendrait moins cher que d’avoir des correspondants partout dans le monde. Donc le gouvernement est la première source d’information, mais aussi les privés peuvent produire de l’information, surtout les grandes entreprises. 
Cependant, la production de l’information doit être rentable et fiable afin que le gouvernement puisse contrôler les médias et fasse passer son message. Ainsi, la relation entre l’État et les médias est une corrélation publique et de propagande.
Ainsi, le gouvernement prévoit un budget de millions de dollars pour distribuer ses informations filtrées, et l’ironie est que ce sont les citoyens qui paient cet argent pour se faire endoctriner. C’est-à-dire, les contribuables participent à la propagande de leur gouvernement contre eux-mêmes, c’est là le génie du système. En plus, les médias privés recrutent des experts pour travailler à leur compte qui, en fin de compte, reproduisent la version officielle de l’information venue du gouvernement. 
Herman prétend que les médias et les journalistes induisent souvent en erreur la population : certains interprètent sans doute une ligne de propagande comme étant vraie, d'autres peuvent savoir qu'elle est fausse, mais le point est inconnaissable et sans importance. Donc, les journalistes reproduisent les informations venant du gouvernement.  

IV)          Contre-feux et autres moyens de pression

En fin de compte, le gouvernement emploi tous les moyens pour avoir la main mise sur les médias. 

V)            L’anticommunisme

La pression sur les médias est une sorte d’épée de Damoclès dont le dernier filtrage est la compagne anticommunisme. Le gouvernement, soutenu par le milieu des hommes d’affaires, attaque n’importe quelle personne ou clan qui soutient le communisme, car ce dernier est dangereux pour leurs affaires et pour le système capitaliste. Par ailleurs, le gouvernement peut même justifier une attaque à l’extérieur du pays contre le communisme. L’emploi de ce terme pousse les médias à suivre les pas du gouvernement. En effet, il est impossible de rester neutre ou sans réaction devant un acte gouvernemental contre le communisme. Bien que ce dernier ait presque disparu après la chute de l’Union soviétique, néanmoins, les Conservateurs, très souvent, l’utilisent en accusant les Démocrates d’être procommunistes. Comme Barack Obama, l’ancien président américain, qui a reçu des tonnes d’accusations de toutes sortes dont celle d’être un socialiste.
Herman appuie cette idée, pour lui les médias sont également contraints par l'idéologie dominante qui a fortement mis en avant l'anticommunisme avant et pendant l'ère de la guerre froide, d’ailleurs elle s’est souvent mobilisée pour amener les médias à soutenir ou à s'abstenir de critiquer les attaques américaines contre de petits États étiquetés communistes comme Cuba.

\\Critique

Chomsky applique ce modèle de la propagande sur des effets concrets. En effet, en appliquant les cinq filtrages sur des effets concrets, le résultat montre que toute information basée par les filtrages trouve son chemin aux médias, car elle répond aux intérêts de la strate supérieure et de l’État. Par ailleurs, de nombreux sujets ne sont pas débattus par les médias, tels que : le budget de l’armée, l’industrie pharmaceutique et la sécurité sociale et l’Accord de libre échange nord-américain (ALENA) et bien d’autres, car le débat ouvert sur ces sujets est contre les intérêts du milieu d’affaires et du gouvernement. Il y a des contrats et de grands marchés d’armement et de médicaments qui nuisent à la propagande menée par l’État et ses alliés si quelqu’un ouvre le débat sur ces sujets. Néanmoins, l’attaque contre le communisme reste vivante, elle reste dans la cour arrière du gouvernement afin de l’utiliser le moment précis contre les adversaires politiques et de la surconsommation du marché. Même la nouvelle technologie : l’Internet accorde à l’État et à la strate supérieure une nouvelle arme afin de passer leur propagande et de contrôler davantage les médias. Ainsi, avec la rapidité des communications à travers les réseaux, il est très facile de les bombarder avec un flou d’informations pour décrédibiliser des articles diffusés contre les intérêts de l’État et de ces alliés. C’est pour quoi le lecteur n’arrive pas à saisir l’information, alors il s’oriente vers les grands médias qui en réalité appartiennent aux groupes liés à l’État. Pire encore, les médias établissent sur les réseaux des catégories d’âge pour cibler par leurs publicités un public précis et par conséquent augmenter leur rentabilité.
D’ailleurs, Herman soutient que le gouvernement possède la capacité d’influencer, sur plusieurs niveaux, de puissantes entités commerciales et collectives pour exercer son pouvoir et mener les médias à ses buts. En plus, les cinq facteurs de filtrage agissent comme des  catalyseurs  par lesquels l'information doit passer et qui influencent considérablement les choix des médias, individuellement, et souvent de manière cumulative.
Bien que le modèle de propagande ait été généralement bien accepté à gauche, cependant, certains sceptiques n’y adhérent toujours pas. 
Par ailleurs, Herman pense que le modèle de propagande peut aider les activistes à comprendre où ils pourraient le mieux déployer leurs efforts pour influencer les médias. 
C’est-à-dire le modèle de propagande peut être une alternative afin de diminuer l’influence des médias de la strate supérieure. En général, les médias les médias traditionnels, en tant qu'institutions d'élite, orientent les informations et les débats selon ses intérêts. En effet, le modèle de la propagande a une efficacité limitée, surtout sur le plan international où le gouvernement distribue les informations qui servent sa politique et les médias dans ce cas manquent d’informations et de sources, notamment le citoyen s’intéresse plus à la politique intérieure, qui est très peu analysée dans les deux textes.
En sus, le communisme est presque inexistant après l’effondrement de l’Union soviétique, le grand pays communiste qui est La Chine pratique le capitalisme économique, le marché libre en conservant sa politique d’uni-parti pour gouverner. 
En revanche, le terrorisme, un nouveau terme, émerge depuis l’attaque terroriste contre les États-Unis en 2001par un groupe radicale islamiste, ce nouvel ennemi inonde les médias, et donne aux grandes puissances la légitimité d’accuser un pays de terrorisme afin de mener une guerre et faire des médias l’instrument fatal pour mener cette propagande comme ce fût le cas de la guerre contre l’Irak en 2003.
Le modèle de la propagande fondé et défendu par Chomsky et Herman reste une hypothèse à développer pour qu’elle soit employée mondialement, sans oublier que Chomsky est un penseur qui est décrit comme un anarchique, un procommuniste par ses adversaires, cette description peut nuire la crédibilité de cette proposition pour décrypter la propagande. En sus, le gouvernement, derrière cette propagande, sont les États-Unis et l’Angleterre cités pour des effets historiques. 
D’ailleurs Chomsky écrit dans son livre Propaganda: « la propagande dans les pays démocrates égale à la matraque dans les pays autoritaires. »  Dans ce cas, il existe plusieurs propagandes dont celle qui se trouve aux États-Unis. En fin de compte, il est difficile d’ôter l’idée, selon certains penseurs, qu’il y a toujours un complot ou une conspiration dans une théorie comme celle qui est proposée par Chomsky et Herman. 
Pour finir Herman dit : « Le modèle de la propagande peut résumer les médias avec une phrase : un système de marché guidé. [1]» Il faut le reconnaitre qu’il y a une complicité entre le gouvernement et les médias afin de duper les citoyens qui restent les victimes sans le savoir. Chomsky en bouclant ce rapport est plus proche de la prédiction de George Orwell dans son roman célèbre intitulé : 1984 ou le Big Father surveille tout le monde à travers l’instrument de sécurité qui est à notre époque la propagande, celle qui oriente le peuple vers la volonté de l’État et de ces alliés.
Selon le modèle de la propagande : fabriquer l’opinion de la masse, falsifier l’histoire pour duper la masse, les relations publiques sont là pour contrôler l’opinion publique et finalement filtrer l’information pour qu’elle ne soit plus neutre, c’est le résumé du cryptage de ce modèle qui est aussi anti-démocratie, car lorsqu’il s’agit des questions politiques fondamentales, les journalistes épousent les intérêts de l’élite et évitent de contrarier les pouvoirs établis. En sus, les médias commerciaux remplacent au fur et à mesure les médias traditionnels afin que le consommateur ne soit plus capable d’interpréter les affaires publiques ou politiques[2].  

Bibliographie

Livres

Chomsky, Noam & Hedward, Herman. La fabrication du consentement De la propagande 
               médiatique en démocratie. Marseille : édits., Agone.
Chomsky, Noam & Robert, W. Mcchesny. 2004. Propagande, médias et démocratie
                Montréal : édits., Écosociété.
Chomsky, Noam.2002. Propaganda. France : édits., du Félin.
  Site Web
Edward S. Herman. 2010. The Propaganda Model: a retrospective. En ligne:
 https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/146167000361195 lien consulté le 18 septembre 2019. 

 Les deux auteurs 
Noam Chomsky (1928 -...) est un universitaire américain de réputation internationale. Influencé par la gauche, ses analyses sont basées sur des tendances socialistes, il est considéré par certains comme un penseur antisystème. 
En revanche, son collègue, Edward S. Herman (1925 - 2017) est un économiste américain qui s’intéresse à l’observation des médias.  Il a de nombreux écrits dont un avec Chomsky.  Cependant, son essai écrit avec le journaliste américain David Peterson intitulé : Génocide et propagande, l’instrumentalisation politique des massacres, montre qu’il est une personne engagée ; surtout à travers ses analyses sur la façon d’aborder le génocide dans les médias.



[1] Chomsky, Noam.2002. Propaganda. France : édits., du Félin.
[2] Chomsky, Noam & Robert, W. Mcchesny. 2004. Propagande, médias et démocratie. Montréal : édits., Écosociété.