Le monde arabe reste figé dans le
temps devant la troisième vague de démocratisation en Amérique latine les
années 1980, puis en Europe de l’Est et en Afrique les années 1990. Beaucoup
d’élite pensent que ce territoire géographique reste loin de la transitologie,
car il s’est habitué à l’autoritarisme. Cependant, sans personne ne se rend
compte, le peuple arabe soulève dans certaines capitales en scandant :
« Le peuple veut la chute du régime. »
Par: Adam Mira
Le 17 décembre 2010, humilié
publiquement, après avoir reçu une gifle d’une policière, Mohamed Bouazizi, un
commerçant ambulant tunisien, se donne la mort par immolation. Ce geste
désespéré déclenche des manifestations un peu partout dans le pays.
Arrivé au pouvoir le 7 novembre
1987 par un coup d’État blanc, le président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali a
tenu le pays d’une main de fer jusqu’à sa fuit avec sa famille le 14 janvier
2011. (Feki 2018)
Après la Tunisie, le pharaon de
l’Égypte Hosni Moubarak tombe, puis comme un jeu de dominos, des présidents
arabes, pourtant au pouvoir depuis des années, ils se retrouvent face à leurs
peuples enragés et déterminés. Certains présidents arabes ont résisté, d’autres
ont été assassinés ou emprisonnés et quelques-uns se sont accrochés au pouvoir par
tous les moyens et ont déclenché une guerre civile, c’est le cas du Yémen.
Après 35 au pouvoir, le 25 février
2012, le président yéménite Ali Abdallah Saleh quitte son poste sous la
pression de la population enragée. Cependant, son départ a plongé le pays dans
une guerre civile qui est devenue une guerre régionale. (Feki 2018)
À la lumière de ce qui est écrit
ci-dessus, la question de cette recherche est:
Pourquoi
les révoltes populaires appelées "printemps arabe" ont-elles
donné des résultats différents : en Tunisie, en Égypte et au Yémen ?
Il y a des facteurs essentiels
dans cette étude: l’un historique, le second culturel et l’autre économique qui
peuvent expliquer les causes du déclenchement de ces révoltes populaires et les
différentes conséquences qui en découlent sur certains pays.
Choix et justification
Le
choix de ce sujet bien délicat est très important, car depuis l’arrivée du
printemps arabe, le monde vit une situation houleuse : des vagues
d’immigrations frappent l’Europe, des milliers d’aventuriers et des rêveurs
avec femmes et enfants meurent dans la méditerranée afin d’atteindre les côtes
européennes. Sans oublier, le terrorisme qui a frappé durement certaines
capitales occidentales pour faire peur aux gouvernements du monde entier. Des
massacres, des génocides sont perpétrés, des armes chimiques sont utilisées
contre des populations innocentes rêvant leur liberté.
La méthodologie
La recherche actuelle
se base sur des méthodes scientifiques afin de bien analyser les facteurs et
les aspects figurent dans les pays choisis. Les approches du sociologue
américain Barrington Moore, sur les origines sociales de la dictature et de la démocratie,
résument que la démocratie est une bataille longue. Pour y arriver à son but,
elle doit avoir trois points : couper la route devant le teneur de
pouvoir, implanter un pouvoir juste et rationnel à la place de pouvoir
renverser et donner au peuple le pouvoir de participer à la mise en place des
pouvoirs. (Moore 1969) Aussi, l’approche
institutionnelle où les institutions sont des variables explicatives : l’histoire,
la culture et les acteurs sur la scène politique. (Gazibo, Jenson 2015)
Cette
méthode servie à la merveille cette recherche, car dans les trois régimes
déchouent, les soulèvements populaires renversent les pouvoirs en espérant
d’installer un régime démocrate, cependant, comme Moor dit la démocratie est un
long combat, alors les peuples dans les pays choisis ont franchi le seuil et
ouvert la porte pour qu’un jour la démocratie s’installe!
Les facteurs
L’Égypte, la Tunisie et le Yémen souffrent
depuis des décennies de problèmes politiques et économiques. Dans un climat
marqué par l’autoritarisme, la corruption à grande échelle et l’inégalité
sociale, la technologie Web 02 apparait en tant que nouveaux moyens
d’information que les soulèvements populaires l’utilisent pour changent la
façade figée du monde autoritaire de ces trois pays. (Feki 2018)
L’institutionnalisation
de l’armée, de la corruption, de clientélisme et de l’appareil coercitif pendant
des décennies ne laisse aucune chance aux milliers de jeunes chômeurs illettrés
et diplômés de sortir à la rue. Seule la rue porte en elle l’espoir de réaliser
leur rêve, celui de renverser le Pharaon ou le Général.
Les
facteurs institutionnels sont l’axe principal de changements à grande échelle
menés par le bas dans la société arabe. Ces institutions expliquent clairement
la cause de la rage de la société révoltée et la colère qui amène les gens
chômeurs à protester contre les régimes en questions.
Les
soulèvements débutent avec des revendications économiques, mais rapidement, ils
se transforment à des revendications politiques, des souhaits de renverser le
régime en implantant un régime démocratique. Des révoltes venant de bas, de la
société marginalisée depuis toujours contre un régime qui fait de la violence
sa seule légitimité. D’ailleurs, briser la barrière de peur est une grande
manœuvre envers la liberté. L’éradication des institutions implantées au fil
des décennies est la cible primordiale pour les remplacer par les institutions
démocratiques.
Points de bascule : des
moments charnières
Tous
les pays arabes sont colonisés sauf le Yémen du Nord. L’Égypte et la Tunisie
ont été sous les protectorats anglais et français respectivement.
Après
l’indépendance accordée aux colonisés, les années au milieu de XXe siècle, les
facteurs externes jouent un rôle incontournable dans le changement de régime
tel que l’Égypte.
Le
14 mai 1948, David Ben Gourion proclame la naissance d’Israël en Palestine. Une
armée s’organise rapidement par des pays arabes dont l’Égypte, la guerre
déclenche entre Israël l’armée arabe dont l’armée israélienne remporte la
guerre. Un officier dénommé Gamal Abdel Nasser retourne à son pays après la défaite,
il fonde un mouvement secret au sein de l’armée égyptienne, en 1952, les Officiers
libres de Nasser accèdent au pouvoir. Ils renversent la monarchie et
proclament la République. Nasser fait deux promesses : construire une
armée et rétablir une économie solide. En 1956, il nationalise le Canal de Suez,
tisse une belle relation avec l’Union soviétique et implante un système
nationaliste. (Mirel 1982)
Le
régime se personnalise autour de Nasser, le raïs. Cette période est
marquée par confisquer les biens de riches et la distribution de terre au Fellah,
la gratuité de l’éducation, la censure, la torture et la pression sur le
mouvement des Frères musulmans, une économie en voix de développer et tout le
monde travaille, le raïs compte sur sa légitimité de fonder un pays
moderne. En 1967, Nasser subit une défaite douloureuse devant Israël, l’économie
se fond et l’armée est presque détruite. Trois ans plus tard, il succombe à une
crise cardiaque, son successeur, Anwar el-Sadat, un militaire, arrive au
pouvoir par un référendum. En 1973, il mène une guerre contre Israël et il la remporte.
Il reçoit sa légitimité après avoir effacé la honte de deux défaites de Nasser,
alors il renforce son pouvoir, après quoi, il change le régime socialiste
contre autre libéral, il ouvre la voie devant les islamistes pour affronter l’extension
de gauche, la liberté d’expression s’étire, une liberté limitée s’installe. À
côté de cette réforme interne, il signe un Accord de paix avec Israël et
devient l’ami des États-Unis. (Mirel 1982)
Sadat
est l’opposé de Nasser, cependant l’armée devient un État dans l’État. En 1981,
Sadat est assassiné par une militaire islamiste. Un nouveau militaire, Hosni
Moubarak, accède au pouvoir, il élimine les islamistes et impose la sécurité et
l’ordre dans le pays et renforce sa relation avec les États-Unis, il continue
dans la voie de Sadat, la violence est une affaire d’État.
Après
deux décennies au pouvoir, Moubarak veut que son fils cadet Gamal devienne son
successeur, un banquier, hors l’entreprise de l’armée, politicien discret et
peu populaire, il est devenu l’homme redouté de régime, il nomme le premier
ministre, les ministres et les députés grâce à son poste au sein du Parti
national démocratique au pouvoir. L’armée gère son empire économique et Gamal
avec son frère aîné Alaa et leurs proches gèrent aussi une bonne partie de
l’économie, le chômage arrive au zénith et la vieillesse de régime est bien
claire. (Guidère 2015)
Le
régime institutionnalise le clientélisme, l’inégalité à grande échelle, la
corruption et l’appareil coercitif qui surveille chaque souffle de peuple
étoffé. L’explosion vient et renverse le Pharaon après quelques semaines de
résistance. L’armée égyptienne refuse de soutenir Moubarak, elle ne veut pas que
Gamal soit le nouveau président, même la justice égyptienne met en prison
Moubarak est ces deux fils. (Daguzan, Valter 2014)
En
revanche la Tunisie, un pays minuscule au Nord d’Afrique, elle accède à
l’indépendance en 1956 après des soulèvements pacifistes contre le protectorat
français. Ce dernier accepte de partir afin de s’occuper de sa guerre contre la
Révolution algérienne. Habib Bourguiba, accède au pouvoir, proclame en 1957 la
République et établi un État moderne et laïc. Il donne aux femmes une liberté
égale à l’homme, interdit la polygamie et marginalise la religion. Il concentre
ses efforts sur l’éducation et le développement économique. (Wilmots 2001)
Le
régime se personnalise par l’appareil policier s’organisant autour de
Bourguiba. L’armée reste à l’écart sans aucun rôle dans la vie politique.
Malgré sa santé en déclin le moudjahid suprême s’accroche au pouvoir et
refuse de partir, la situation économique devient précaire et débouche sur un
soulèvement du pain en 1983. La montée des islamistes se continue depuis le
début des années quatre-vingt. Le clientélisme et la corruption s’institutionnalisent
avec un président faible et malade. En conséquence, en 1987, son premier
ministre, un ex-militaire, Zine el-Abidine Ben Ali fait un coup d’État blanc, il
renverse Bourguiba et accède au pouvoir sans partage.
Ben
Ali élimine sans pitié les islamistes et développe à grande échelle l’économie.
La Tunisie se développe rapidement et la situation s’améliore graduellement. La
nouvelle posture donne à Ben Ali une légitimité, il tient sa promesse de
développer l’économie et limite les mandats de président. Cependant, il
renforce l’appareil coercitif qui mésaule n’importe quelle voix s’exprimant
contre le régime. Le nouvel arrivant au Palais présidentiel essaie d’avoir plus
d’investissements dans le pays, en profitant de la relation tendue entre
l’Algérie et le Maroc à cause de Polisario, donc chaque année un million
algérien passe les frontières pour ses vacances en Tunisie. Des milliers de Libyens
aussi y passent de longs jours, la Tunisie semble pour des Libyens leur
deuxième pays, surtout la Libye de Kadhafi subissant pendant des années un embargo
aérien à cause de son soutien aux mouvements extrémistes et l’affaire de
Lockerbie. Pourtant, les villages tunisiens restent marginalisés, le chômage,
la pression policière, la pauvreté et la drogue dominent la situation. Cependant,
un militaire ne gouverne jamais seul, alors retour à la case départ, il aussi
institutionnalise le clientélisme et la corruption, la famille de la femme de
Ben Ali est la vraie maîtresse du pays en coulisse. (Guidère 2015)
Après
l’incident de Bouaziz à Sidi Bouzid, une petite ville, les soulèvements débutent
et arrivent aux portes du Palais présidentiel à Tunis. Des soulèvements pour
des raisons économiques, ils se métamorphosent en des revendications
politiques, quelques semaines après, le régime Ben Ali cède et le peuple
remporte la première manche. (Feki 2018)
En
effet, le Yémen est la seule République dans la péninsule Arabique, un pays tribal
de confession 47 pour cent zaydite chiite et 53 pour cent chaféite
sunnite. Il était divisé pendant longtemps entre le sud et le nord.
D’ailleurs le Yémen du Nord n’a jamais été colonisé et dominé par l’Imamat zaydite
jusqu’en 1962 où l’armée prend le pouvoir. En revanche, le Yémen du Sud reste
sous protectorat anglais jusqu’en 1967. L’armée yéménite au sud et au nord se dispute
le pouvoir. En 1990, le Yémen du Sud et le Yémen du Nord s’unissent et fondent un
Yémen uni sous la gouvernance d’Ali Abdallah Saleh. (Arendonk
1960)
D’ailleurs,
le Yémen est aussi le berceau de la famille d’Oussama Ben Laden, grâce à la
guerre contre le terrorisme déclenchée après l’attaque terroriste de 2001 aux
États-Unis, le Yémen Uni se trouve d’être obligé de devenir l’allié de l’Arabie
saoudite et des États-Unis, sinon il sera une cible potentielle comme l’Irak. Al-Qaïda
alors s’installe au Yémen et mène une « guerre sainte » contre
le gouvernement à Sanaa, la capitale du Yémen Uni.
En
1978, Ali Abdallah Saleh, nommé le petit caporal, accède au pouvoir après l’assassinat
du président Ahmad Ben Hussein al-Ghashmi, l’Assemblée constituante le nom
président. Tous les signes débouchent sur un seul point que Saleh ne resterait
au pouvoir que quelques mois. Toutefois, il gouverne 35 ans sans partage,
jusqu’à son départ forcé en 2012. Dès son arrivée à la tête du Yémen du Nord,
il désigne ses proches aux postes clés, distribue d’autres aux différentes
tribus. En revanche, ses fils et ses neveux s’adhèrent à l’armée. Dès le
départ, il institutionnalise le clientélisme, la corruption et l’armée. (Bonnefoy
2017)
Saleh
prétend nommer son fils aîné Ahmed, un général de l’armée yéménite, en tant que
son successeur. Cependant, il tombe dans plusieurs pièges, il marginalise le
peuple du Sud, l’État perd des milliards de dollars à cause d’une
administration corrompue et l’économie dans situation lamentable, il est
classé, selon United Nations Development Programme, parmi les pays le plus corrompu
dans le monde, avec 35 pour cent de taux de chômage et 45 pour cent de sa
population vivant en dessous du seuil de pauvreté fixé à 2 dollars par jour. En
plus la guerre contre Al-Qaïda, puis l’émergence de Houthis, un mouvement
zaydite chiite, qui demande l’égalité, le développement de lieux ruraux et
proteste l’alliance entre Saleh et les États-Unis et l’Arabie saoudite. La
guerre de Saleh s’allergie, plus de la moitié du budget est pour la sécurité et
l’armée, le peuple yéménite finalement soulève contre Saleh qui s’accroche au
pouvoir et refuse de partir. Cependant, le peuple persiste et finalement Saleh
cède et part pour plonger le pays dans une guerre civile. (Bonnefoy 2017)
Contre révolution
En Égypte et en Tunisie, chacune
réussit à rédiger une constitution et à organiser des élections législatives et
présidentielles. En revanche, au Yémen, la situation s’obscurcit et une guerre
sans issue continue. Cependant, il est important de définir certains termes
pour éclairer les étapes prochaines de cette étude.
-
Les Frères musulmans :
Un mouvement fondé en 1928 à
l’Ismaïlia en Égypte par le Sheikh Hassan el-Banna, assassiné en 1949. Les
Frères font une étroite relation avec l’armée égyptienne. À l’époque du
protectorat, la famille de président Anwar el-Sadat, un partisan du mouvement,
reçoit un salaire mensuel de 10 livres égyptiennes pendant son incarcération,
même el-Banna donne des cours religieux aux soldats égyptiens. (Sadat 1978)
Grâce à l’Université d’al-Azhar au
Caire où chaque année reçoit des étudiants du monde musulman pour étudier
l’Islam. Le mouvement s’installe dans tous les pays, il recrute les étudiants
musulmans et pendant quelques années, ce petit mouvement devient parmi le plus
grand et riche au monde. Il possède des branches sous différents noms un peu
partout dans le monde, reçoit aussi des dons considérables de ces membres et de
riches musulmans. Il est flexible,
c'est-à-dire, chaque branche est libre de son administration, car chaque pays
possède sa situation particulière. Néanmoins, le président du mouvement reste
toujours égyptien, il reçoit le serment de tous les leaders de différentes
branches dans le monde. Le mouvement entre en conflit avec le gouvernement
égyptien les années 1960 et devient interdit, il choisit le travail social et
implante un immense réseau où se trouve, pour cette raison, lorsque le
printemps arabe apparaît, les islamistes sont prêts d’accéder au pouvoir dans
les pays en question et ailleurs. En effet, les Frères musulmans sont le
mouvement le plus ancien, tous les mouvements islamistes qui émergent après,
ils possèdent un lien avec la maison mère, Ayman el-Zawahiri le chef actuel
d’Al-Qaïda était un adepte de ce mouvement. (Véliocas 2016)
-
Chiite et sunnite :
Après la mort du fondateur de
l’islam Mohamed en 632 d’ère commune, un conflit déclenche entre ses apôtres,
l’islam se divise en deux : chiisme et sunnisme. Les chiites choisis de
suivre Ali, le gendre du Prophète, en tant que le seul légitime d’être le
successeur de Mohamed, au fil de temps ils se devisent en plusieurs branches
dont les zaydites au Yémen. Les chiites sont 15 pour cent des musulmans
dont l’Iran est leur leader. (Bencheikh 2001)
Les sunnites optent pour la voie
du Prophète, ils suivent ces traces et imitent ce qu’est écrit sur lui dans la Sira,
l’histoire de Mohamed. Les sunnites sont 85 pour cent des musulmans dont
l’Arabie saoudite est leur leader, car il dirige les lieux les plus saints dans
l’Islam : La Mecque et la Médine. (Bencheikh
2001)
En ce sens, la religion est une
culture qui devient au fil de temps une identité dans le monde arabe dont les
trois pays en question. Malgré l’implantation de l’État laïc en Égypte et en
Tunisie, la religion reste un élément incontournable dans la société arabe,
comme Ramadan, le mois de jeûne, est une période sacrée dont les personnes qui
ne le respectent pas publiquement, elles reçoivent une peine de prison entre un
mois et un an, beaucoup de volontaires peuvent exécuter cette loi avec joie. En
effet, la religion après l’arrivée du printemps arabe est devenue un facteur
majeur en Égypte et en Tunisie, bien qu’elle y soit depuis toujours au Yémen un
facteur dominant dans la vie politique. (Corm 2015)
La religion est une institution
qui jour un rôle de clivage dans la société arabe, et cause de guerre entre les
différentes branches de même religion, et donne l’opportunité aux étrangers de
se mêler dans ce conflit interne comme le cas yéménite.
Le vent qui tourne
Dans le cas égyptien, l’Armée perdrait son
état parallèle avec un président hors l’institution militaire. Par conséquent,
elle sacrifie le président Moubarak au profil des généraux. Cependant, les
Frères musulmans qui rêvent le retour sur la scène, ils fondent, en 2011, leur
parti politique Le Parti de la Liberté et de la Justice. L’année
prochaine avec des élections libres jamais vu en Égypte, Mohamed Morsi, un
militant fervent de confrérie, intellectuel avec une éducation américaine, élu
en tant que président en 2012 avec 51,73 pour cent de suffrage universel.
(Stadnicki 2015)
Morsi devient immédiatement l’ennemi
juré de l’Armée et ses alliés élites, notamment ces derniers se trouvant
marginalisés à l’arrivée de nouveau régime élu démocratiquement et légitime. Le
nouveau régime a le devoir de résoudre tous les problèmes du régime militaire au
pouvoir pendant cinquante ans (1952- 2011). C'est-à-dire qu’il doit commencer à
zéro par rédiger une nouvelle constitution et institutionnaliser la démocratie.
Toutes les institutions (la corruption, le clientélisme, l’appareil coercitif
et l’armée) doivent être démantelées. Morsi n’a pas l’expérience, son
comportement est loyal aux Frères musulmans, il commet des fautes après l’autre,
il n’arrive pas à résoudre un seul problème, les gens sont pressés, néanmoins,
le temps se fige dans une Égypte déchirée. L’armée renforce son lien avec les
élites, ces derniers soutiennent l’armée. (Guirguis 2015)
En
effet, Abdelfattah el-Sissi reçoit l’accord de l’armée et fait son coup d’État
sanguinaire le mois de juillet. En 2013, pendant deux jours, 14 et 16 août,
l’armée attaque le sit-in pacifiste des islamistes contre le coup
d’État. La place Rabia-El-Adaouïa au Caire est le témoin de ce massacre où des
centaines ont péri sous les balles réelles. La machine des médias appui l’acte
et une nouvelle ère survole en Égypte. Les islamistes optent pour la
clandestinité, ils portent les armes et entament leur guerre contre l’armée,
leurs leaders sont en prison incluant le président Morsi et le guide suprême de
la confrérie. Le Maréchal élu et réélu avec 98 pour cent et il n’a pas l’air de
céder son siège. L’autoritarisme retourne à dominer le pays à grande échelle,
la défaite du soulèvement est amère. Tous les visages connus participant au printemps
égyptien sont derrière les barreaux, malgré la situation lamentable de
l’économie, la censure et le retour en force de l’appareil coercitif et la
condamnation de la religion, le peuple reste muet sans voix, il préfère la
sécurité à la place de la liberté. (Guirguis 2014)
L’économie
est dans une situation catastrophique, Sissi déclenche un projet de sauvetage à
l’aide de l’Arabie saoudite et de l’Émirats arabes unis, mais sans succès. Il
retourne à l’époque de Nasser, il renforce l’appareil coercitif, et l’armée
s’occupe de la guerre contre les djihadistes au Sinaï. Il met tous les
opposants en prison, même ses collègues de l’armée qui ont tenté leur chance de
se présenter aux élections présidentielles. Le système utilise le terrorisme
comme un instrument pour condamner les Frères musulmans, éliminer les opposants
et donner le pouvoir sans partage au Sissi.
En
effet, les élections législatives et présidentielles qui ont amené les
islamistes au pouvoir ne représentent pas réellement la société égyptienne, car
six ans avant le printemps égyptien, il y a eu des mouvements civils-laïcs comme :
6 April, Kefayya (ça suffi) et d’autres, ils manifestaient régulièrement
contre le régime et demandaient son départ, les islamistes, en particulier les
Frères musulmans manifestent un peu plus tard. Cependant, ces derniers gagnent rapidement
la rue grâce à leur réseau et à leur organisation. Les jeunes qui utilisent les
réseaux sociaux sont partout en Égypte, toutefois, ils leur manquent un leader
qui est capable de les incarner, en revanche, les islamistes sont prêts depuis
toujours de s’emparer de pouvoir, d’ailleurs ils se préparent depuis décennies
et finalement, ils profitent de cette aubaine inédite et accèdent au pouvoir
par des votes légitimes. (Ghonim 2012)
Alors,
l’armée reçoit l’appui des petites villes dont l’Association des Frères
musulmans aide les pauvres et les démunies, les députés de confrérie qui ont
été élus, ils quittent leurs villes afin de s’installer au Caire, ils ont tout
de suite oublié leurs électorats, beaucoup d’électeurs votent contre les
islamistes et donnent leurs voix à l’armée, ils ont pris cette décision par
vengeance ou manque de culture politique, bien que certains villages restent
fidèles aux islamistes. (Stadnicki 2015)
En
effet, après une période provisoire, en 2014, l'Assemblée constituante élue le
23 octobre 2011 à la suite de la révolution adapte une nouvelle constitution et
organise des élections législatives et présidentielles, au premier temps, une
majorité de la population donne sa voix aux islamistes, el-Nahda, une
branche des Frères musulmans. Il gagne les rues tunisiennes, malgré la majorité
des opposants qui sont laïcs : des nationalistes, des gauchistes et le
féminisme est bien imposée dans la société. Néanmoins, el-Nahda remporte
durant la première élection législative libre organisée jamais vu en Tunisie 89
sièges de 217. Ils forment le gouvernement avec son allié Mouncef el-Marzouki,
un militant laïc pour le droit de l’homme et un opposant farouche de Ben Ali, el-Nahda
dirige le gouvernement et Marzouki est le président de pays. (Feki 2018)
En
2014, el-Nahda perd le pouvoir, et les Tunisiens votent pour Nidaa
Tunis un parti politique laïc. Il accède au pouvoir avec le support d’el-Nahda,
les Frères musulmans tunisien choisissent leur pays à la place de la confrérie.
En dépit de plusieurs assassinats contre des militants laïcs, et des
accusations menées contre el-Nahda, la restauration de la démocratie
continue au pays. Le président tunisien actuel est un laïc et le fils de deux
régimes implantés après l’indépendance, sa gouvernance sort d’une crise pour
tomber dans d’autres, son fils essaie d’être un successeur légitime par le parti
Nidaa Tunis, cependant, beaucoup de membres luttent contre lui et le Parti
se divise. Bien que des islamistes tentent leur chance de commettre des attentats
en vue d’affaiblir le régime, le peuple tunisien reste vigilant contre
n’importe quelle tentative d’implanter à nouveau l’autoritarisme et
d’institutionnaliser la corruption et le clientélisme. (Guidère 2015)
Dans d’autre cas, le Yémen n'arrive pas à se mettre debout après le
départ de Saleh, ce dernier quitte le pouvoir et laisse sa place à son vice-président
Abdrabo Manseur Hadi qui est d'origine du Yémen du Sud. En 2012, il est
élu comme président dans des élections de suffrage universel pour deux ans. Saleh
tisse en 2014 une relation avec les Houthis, ses anciens ennemis, pour qu'il
déstabilise le pays et le gouvernement de Hadi.
En 2014, les Houthis s’emparent de Sanaa et une bonne partie du pays,
l’Arabie saoudite déclenche en 2015 L’Opération Tempête décisive pour chasser
les Houthis, un front régional et arabe sous l’égide de l’Arabie saoudite pour
chasser les Houthis. Ces derniers renforcent leur relation avec Iran chiite qui
est l’ennemi juré du Royaume sunnite. D’ailleurs, l’Iran essaie à travers ses
milices de devenir le leader incontournable du Moyen-Orient, ses milices se
trouvent en Irak, au Liban, en Syrie et au Yémen. L’Arabie saoudite considère
le Yémen en tant que sa profondeur stratégique, elle refuse de laisser aux
alliés d’Iran de menacer sa sécurité. Surtout qu’il y a aussi Al-Qaïda qui joue
un rôle important dans l’instabilité de Yémen et le gouvernement de Hadi qui
essaie de restaurer le pays et rétablir une démocratie, cependant, la situation
se grade jour après jour et la guerre se poursuivi entre les Houthis et Hadi
soutenu par l’Arabie saoudite. En 2017, Saleh est assassiné par les Houthis
après avoir rompu son alliance avec eux. (Bonnefoy 2017)
Le Yémen possède une situation très compliquée par rapport aux autres pays,
un pays tribal, les traditions sont plus fortes que la loi de l’État,
l’Assemblée de peuple est composée de Sheikh ou de leurs fils qui représentent
leurs tribus, l’absence d’une classe moyenne qui peut stimuler le pays,
progresser son économie et la vie politique, les Frères musulmans présentés par
le Parti politique al-Islah se trouvent dans l’opposition contre Saleh
et qui présente en même temps la tribu el-Ahmar la plus puissante au
Yémen, les sudistes qui prétendent de se séparer du Yémen du Nord. En
plus, la situation économique et l’institutionnalisation de la corruption, de
népotisme, de clientélisme et de l’armée. Sans oublier les intérêts régionaux
et américains d’avoir un Yémen stable afin d’éradiquer Al-Qaïda et mets fins à
la révolte des Houthis. Une situation délicate qui ne laisse aucun espoir.
La défaite de transitologie dans les trois pays
Le printemps arabe a de
différentes sortes en Égypte, en Tunisie et au Yémen pour des raisons dépendantes
de chaque pays.
Pendant une rencontre avec l’ex-président tunisien el-Mazouki à Montréal en
2017, il avoue que les régimes autoritaires arabes ont vidé la société civile
de ses leaders, ils n’ont permis à aucune tendance d’avoir une base populaire. Pour
cette raison, à l’arrivée du printemps arabe, les soulèvements populaires sont
en général devenus des affrontements violents entre le peuple et l’appareil
coercitif ou l’armée. Auparavant, la violence était le monopole de l’État, mais
après 2011, tellement la société a vécu de violence pendant des décennies, la
violence est devenue la seule solution de régler la moindre de litige.
En Égypte, l’armée qui a la mainmise sur le gouvernement, ses intérêts économiques
colossaux et son rapport avec les élites renforce son pouvoir. Pour cette
raison, il serait impossible que l’armée laisse le pouvoir à un civil, et la
révolte de bas est condamnée à la défaite, car elle manque d’un leader qui
pourrait menacer la gouvernance de l’armée. Le nouveau régime du maréchal
el-Sissi qui institutionnalise à nouveau le clientélisme, la corruption et
l’appareil de coercitif et ajoute le terrorisme comme un élément qui fait peur
au peuple étoffé. La peur d’une guerre civile est la seule explication qui
tient le peuple égyptien immobile malgré la situation catastrophique sur tous
les champs : économique, sécuritaire, politique et démocratique, mais
l’arrivée d’une nouvelle vague de révolte est une question de temps,
En revanche, la Tunisie reste un
pays particulier dans le monde arabe qui a choisi la voie démocratique, car
l’armée est à l’écart depuis l’indépendance, la société civile est très active,
les islamistes et les laïcs se côtoient sans soucis, bien que la Tunisie soit
le premier pays arabe qui a des djihadistes en Syrie et en Irak, cependant,
malgré la montée des intégristes en Tunisie, il y a une volonté gouvernementale
et populaire afin de restaure un pays démocrate dont la femme prend le cœur de
cette restauration. Le peuple tunisien est conscient de ses droits et de la
démocratie comme un élément important pour le développement de pays et pour sa
stabilité, pour cette raison, la voie vers une démocratie reste probable dans
un pays où l’armée reste à l’écart.
En effet, le Yémen reste une situation difficile à trouver une solution
dans un futur proche, car il y a des problèmes internes liés avec la
construction de la société yéménite en tant qu’une société tribale et
religieuse, la guerre contre Al-Qaïda et externes liés avec l’Iran qui soutient
les Houthis, d’autant plus l’armée qui joue le rôle principal et possède la mainmise
sur le pouvoir, sans oublier les sudistes qui rêvent la séparation. C’est un État
mélangé entre les tribus, la tradition et l’armée. Le soulèvement de jeunes Yéménites
a échoué, car l’armée est forte et elle ne laisse pas sa place à personne, et
si un jour la guerre est finie, l’armée seule aurait la grande opportunité de
retourner au pouvoir, car la classe moyenne qui le moteur de tout changement
n’existe pas civile. Il est probable que le Yémen du Sud se sépare, dans ce
cas, la situation serait beaucoup mieux, car le destin de deux Yémen est
différent historiquement.
Conclusion
Tous les yeux des jeunes arabes sont orientés vers l’expérience tunisienne,
le berceau du printemps arabe. Si la Tunisie réussit à restaurer une
démocratie, l’armée comptera ses jours en Égypte et au Yémen. Dans ce cas, une
question qui se pose : le monde arabe restera-t-il dominé par des
autoritaires et refuse la restauration de la démocratie ?
La réponse vient par Moor que la bataille de la
démocratie est très longue. Cela dit le peuple arabe devra se rappelle de l’Angleterre
qui a combattu des siècles pour qu’elle devienne la source de toutes les
démocraties mondiales. Donc, lorsque la société civile arabe devient active et
prend conscience que la démocratie est la seule voie pour construire un pays
moderne, dans ce cas, une nouvelle vague de démocratie frappera ce territoire. A.M