samedi 25 janvier 2020

Propagande entre exagération et réalité!



Dans la société en général et au sein du monde médiatique, on a parfois tendance à exagérer l’impact de la propagande relayé par les médias, à laquelle certains prêtent des effets puissants, voire directs, sur les opinions, les attitudes et les comportements des individus. D’où vient cette notion d’effets directs (et les concepts/théories s’y rattachant) et pourquoi celle-ci a-t-elle été largement rejetée par la communauté scientifique?
Par: Adam Mira
Exagérée, manipulée, influencée, ce sont les adjectifs décrivant la propagande qui selon l’école classique de Harold Dwight Lasswell, Edward Bernays et d’autres a un effet direct sur l’attitude des individus, d’autres comme Éric Maigret, Philippe Boulanger, Denis McQuail et bien d’autre pensent au contraire, voire elle a un effet limité.  
La propagande possède une histoire montant à la fin du XIXème siècle, un terme utilisé par les États du régime distincts pendant les différents genres de guerres afin de faire profits. Ce concept évolue et prend l’ampleur avec le temps, engendre aussi des notions telles que les effets directs méritant à étudier. 

D’où vient cette notion d’effets directs (et les concepts/théories s’y rattachant)?

La théorie du behaviorisme a dominé le champ de science sociale jusqu’à la fin des années 1950, voire 1960. Harold Dwight Lasswell (1902-1978), un éminent de l’école classique, donne à la propagande une influence forte sur l’attitude de masse qui oriente la société selon la volonté de celui qui la fabrique.  
« La propagande est la gestion des attitudes collectives par la manipulation de symboles significatifs. Le mot attitude signifie une tendance à agir selon certains modèles d'évaluation. L'existence d'une attitude n'est pas une donnée directe de l'expérience, mais une inférence à partir de signes qui ont une signification conventionnelle.[i]»  (Lasswell 1927, 627) (Traduction de l’étudiant) 

Dans la même voix, Edward Bernays (1891-1995) insiste sur la propagande en tant qu’outil crée par l’homme afin de manipuler le collectif, son expérience en tant que membre de la commission Creel, crée en 1917 par le président américain Thomas Wilson, afin d’amener le peuple américain à donner son consentement au gouvernement de participer à la Première Guerre mondiale[ii],  cette participation lui donne la notoriété de devenir une référence pour la propagande. Il invente le concept la fabrication de l’opinion publique et croit que la société est divisée en deux : une masse a une pensée limitée dénommée : le peuple dérouté, et les élites, une petite partie de population qui guide la société. Cette élite qui combine soi-disant le gouvernement invisible[iii]!     
Selon Bernays et Lasswell, qui font partie de la théorie du behaviorisme, la propagande possède un effet direct sur la population et domine son attitude au profit de celui qui la fabrique. 
Les deux penseurs ont vécu une période atroce de l’histoire contemporaine de l’humanité dont la 1ère et la 2ème Guerre mondiale, en effet, leur pensée est liée avec le contexte vécu, car d’autres chercheurs pensent au contraire, comme cette étude allant montrer dans les pages suivantes.

Effets directs : concepts et théories

Denis McQuail croit que le concept des effets directs de médias passe par quatre phases : la première des médias tout-puissants commence au début du XXème siècle à 1930, cette phase soutient l’idée de l’école classique. La deuxième où la théorie des médias puissants mise à l'épreuve par des scientifiques et chercheurs déduisant qu’il y a d’autres facteurs sociaux et psychologiques qui influence l’opinion publique sans négliger les facteurs commerciaux et politiques. La troisième des médias puissants redécouverts au début des années 1980 et finalement l’influence des médias qui débouche sur une discussion afin d’accepter ou réfuter cette influence[iv]. Cependant, McQuail conclut que le pouvoir des médias et son influence varie selon le temps et selon les cinq types de communication employés pour un but précis[v]
Dans la même voix, Éric Maigret parle du piège des théories des effets directs de médias. Pour lui, la radio a une période d’influence, cependant, il explique que la monté de Hitler en Allemagne au pouvoir n’a pas un lien avec la radio, qui était à cette époque-là entre les mains de ses adversaires, c’est-à-dire, il n’y a pas un lien causal entre la radio et l’avènement de Hitler au pouvoir. Il rejet aussi la pensée de Laswell qui dit que les médias procéderaient par injections dans les esprits pour produire certains types de comportements[vi].  En effet, selon Maigret, certains chercheurs essaient de faire lien entre la violence et les médias. Il explique par des exemples concrets aux États-Unis et au Japon que la relation entre les médias et la violence est totalement limité. Et les médias ne sont pas les responsables de l’attitude violente de masse. 
« Le paradigme des effets forts est un paradigme faible parce qu’il apporte une information très limitée sur la réalité de l’interaction sociale. » (Maigret 2008, 54)

Pourquoi celle-ci a-t-elle été largement rejetée par la communauté scientifique?

À l’instar de ce qu’est écrit ci-dessus, les scientifiques ont réfuté le concept des effets directs de médias sur l’attitude de masse, ils expliquent avec des preuves et de recherches empiriques la limite des médias sur le comportement de société.
Selon une étude faite par Scott Straus sur la corrélation entre la radio et la violence durant le génocide au Rwanda en 1994[vii], il conclut que l’influence de Radiotélévision Libre des Mille Collines (RTLM), qui diffuse un discours de haine avec des vocabulaires choisis soigneusement pour assassiner la minorité Tutsi, était limitée. D’ailleurs dans l’abstrait de cette étude Straus écrit : 
« L’article réfute l'idée reçue selon laquelle les émissions de la célèbre radio RTLM étaient un facteur déterminant du génocide. L'article trouve plutôt des preuves d'effets médiatiques conditionnels, qui ne prennent de l'importance que lorsqu'ils sont situés dans un contexte plus large de violence. » (Straus 2007,609) (Traduction de l’étudiant)

     Straus aborde le terme effet conditionnel mentionné par Denis McQuail qui fait partie du type de propagande médiatique influençant le collectif sur certaines conditions et contextes particulières qui reste toujours limité. 
En effet, Rwanda un pays à faible tirage de journaux et peu de postes de télévision, la radio était le moyen de communication principal du gouvernement pour diffuser des messages à la population. RTLM a dirigé les efforts de propagande en diffusant des messages incendiaires en utilisant des vocabulaires bien choisis appelant à l'extermination de la minorité Tutsi. L’étude de Straus preuve que l’effet direct a augmenté parmi les milices entre 12-13% et par les individus à 10%. Il mentionne aussi que l’influence de RTLM dans les villages étaient plus considérables qu’ailleurs où les ondes ne couvèrent pas tout le pays, ce qui correspond à l'hypothèse des interactions sociales déterminant la diffusion spatiale de la violence[viii]. La théorie de la communication persuasive abordée par de Garth S. Jowette et Victoria O’Donnell dans leur essaie Propaganda & Persuasion[ix] est aussi possède un effet direct limité sur la croyance et le comportement de masse, encore le modèle de conviction dans la RTLM qui diffuse des slogans légitimant les actes violents contre la minorité Tutsie comme : « Tuer, ou être tué. » encourage les Hutus de massacrer les Tutsis et condamnent et massacrent aussi les Hutus qui soutiennent les Tutsis. Cependant, malgré le fait que les Hutus reçoivent des messages de haine diffusés par la RTLM soutenu par le gouvernement et les milices, leurs motifs pour massacrer les Tutsis sont de piller les avoirs de ces derniers et défendent leur ethnie[x].
En fin de compte, Straus conclut que les effets directs des médias restent limités, il a touché une partie infime de Hutu entre 10 à 12 %, malgré le fait que les effets directs durant le génocide rwandais soient médiocres dans le pays. 
Par contre, Philippe Boulanger parle de l’influence décisive des médias dans le conflit interne sur la scène internationale, ces médias qui poussent les grandes puissances d’intervenir comme elles ont fait en ex-Yougoslavie[xi]. Cependant, le massacre du Rwanda échappe à l’étude Boulanger dont Straus parle dans son étude que ce génocide était négligé par les médias internationaux.
Il est primordial d’évoquer les valeurs occidentales envers les médias, en tant qu’un pilier incontournable de la démocratie, ces convictions bloquent leur intervention d’arrêter la diffusion de RTLM[xii], car la fermeture de la radio est liée avec la liberté d’expression.   

Conclusion

Le pouvoir de médias reste toujours un sujet du débat, les effets directs et son influence sur la masse reste aussi une discussion sans fin, notamment avec l’émergence de médias numériques et des plateformes qui augmentent la fourchette de la liberté d’expression. Certes, Philippe Boulanger explique que les guerres étatiques sont bien diminuées durant les deux décennies du XXIème siècle contre les guerres internes entre les ethnies et les communautés, cela dit les médias vont avoir un rôle primordial à l’avenir dans ce genre d’animosité et rivalité.  
En effet, quoi que les illettrés soient beaucoup moins par rapport au XXème siècle, les propagandistes trouvent toujours des outils afin d’influencer la masse pour tirer de profits, les médias et ses effets resteront pour le temps un sujet de grand débat. 

Références

[ii] Chomsky, Noam &Edward S, Herman. 2008.La fabrication du consentement : de la propagande médiatique 
                en démocratie. Marseille : édit. Agone.
[iii]  Bernays, Edward. Propaganda Comment manipuler l’opinion en démocratie. 2008. Montréal : édit. Lux 
                Éditeur. 
[iv] McQuail, Denis. 2005. McQuail’s Mass Communication TheoryLondon: SAGE Publications, 455-
            64 (chapitre 17, en particulier « The Natural History of Media Effect Research and Theory: Four 
             Phases »).
[v] Ibid.
[vi] Maigret, Éric. 2008. Sociologie de la communication et des médias. Paris : Armand Colin, 45-55 
            (Chapitre 3, « Le piège des théories des effets directs »).
[vii] Straus, Scott. 2007. « What Is the Relationship between Hate Radio and Violence? Rethinking Rwanda’s 
            “Radio Machete” ». Politics and Society 35 (4): 609-37. 
[viii] Ibid.
[ix] Jowette, Garth S.& Victoria, O’Donenell. 2012. Propaganda & Pression. California: Sage.
[x] Ibid.
[xi] Boulanger, Philippe. 2014. Géopolitique des médias : Acteurs, rivalités et conflits. Paris: Armand Colin, 
             225-62 (chapitre 8, « Médias et conflits armés »).
[xii]  Ibid.



















































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